Crédit immobilier : retrait de la réforme du Haut Conseil de stabilité financière lors de son examen à l'Assemblée nationale

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par LCP.fr, le Mardi 30 avril 2024 à 10:53, mis à jour le Mardi 30 avril 2024 à 10:55

La proposition de loi complétant "les dispositions applicables au Haut Conseil de stabilité financière", visant à modifier le fonctionnement de cette instance pour faciliter l'octroi de crédits immobiliers aux ménages, a été retirée, dans la nuit de lundi 29 à mardi 30 avril, par son rapporteur Lionel Causse (Renaissance), pendant son examen à l'Assemblée nationale. 

La proposition de loi complétant "les dispositions applicables au Haut Conseil de stabilité financière", visant à modifier le fonctionnement de cette instance pour faciliter l'octroi de crédits immobiliers aux ménages, a été retirée, dans la nuit de lundi 29 à mardi 30 avril, par son rapporteur Lionel Causse (Renaissance), pendant son examen à l'Assemblée nationale. 

Après plusieurs heures de débats dans l'hémicycle, le député a estimé que des amendements adoptés en soirée avaient trop dénaturé le texte, qui était examiné en première lecture. "Je demande le retrait de ce texte qui n'a plus aucun sens et plus aucune raison d'être", a-t-il déclaré. 

Soutenu par Bercy, mais vu d'un mauvais œil par la Banque de France et par la Banque centrale européenne, la proposition de loi visait à répondre en partie à la chute de l'octroi nouveaux crédits attribués aux ménages pour acquérir un logement, alors que de nombreux Français peinent à se loger et, plus encore, à se loger correctement. En cause notamment, le coût des crédits immobiliers, qui est toutefois reparti à la baisse au premier trimestre. Créé en 2013 en tirant les leçons de la crise financière de 2008-2011, le HCSF a fixé au fil des ans un ensemble de préconisations sur le crédit immobilier dans le but de limiter le surendettement des ménages.

Les banques n'ont ainsi pas le droit de signer un crédit immobilier si le montant total des dépenses des emprunteurs liées à l'habitation dépasse 35% de leurs revenus (taux d'effort), ni pour une durée supérieure à 25 ans, sauf si des travaux représentent 10% du montant total de l'opération. Des bornes qui peuvent être contournées dans 20% des cas, sous conditions.

"Renforcer la légitimité démocratique"

Le premier article de la proposition de loi initiale ajoutait deux membres au Haut Conseil de stabilité financière qui en compte actuellement huit, afin qu'un député et un sénateur siègent au sein du HCSFLa présence de parlementaires contribuerait "à renforcer la légitimité démocratique des mesures prises", avait fait valoir Lionel Causse, réfutant une menace sur l'indépendance du Haut Conseil vis-à-vis du pouvoir politique, comme le craignaient notamment les députés du groupe Socialistes.

La majorité présidentielle a toutefois finalement voté contre cet article en raison de l'adoption d'amendements de la France Insoumise. L'un prévoyait que les parlementaires qui devaient être désignés par la présidence de l'Assemblée nationale et du Sénat le soient "au sein des oppositions parlementaires", et l'autre qu'ils aient chacun un suppléant. Le majorité proposait de son côté une formulation assurant, selon elle, qu'au moins un des deux élus soit issu de l'opposition, déplorant "l'organisation trop complexe" créée par les retouches adoptées.

L'autre mesure phare du texte, déjà remaniée en commission, l'a encore été en séance lundi soir. Elle offrait dans sa version initiale la possibilité de déroger aux normes du HCSF en matière de conditions d'octroi de crédit, mais elle avait été réécrite pour maintenir "l'effectivité des pouvoirs" du Haut Conseil. En prévoyant que ce dernier pourrait "fixer les conditions" dans lesquelles les établissements de crédits "peuvent déroger à ses décisions".

Mais, là encore, l'adoption d'amendements, émanant de députés d'opposition comme de la majorité et soutenus par le gouvernement, ont constitué la modification de trop aux yeux du rapporteur de la proposition de loi. 

Aujourd’hui, notre pays accepte qu’un foyer puisse mettre 50 % de ses revenus dans un loyer, mais on va lui refuser un taux d’endettement à hauteur de 40 % pour acquérir un bien. Lionel Causse (Renaissance)

Ces amendements supprimaient la mesure prévoyant une durée maximale de validité des décisions du HCSF, fixée à trois mois en commission et que le rapporteur était prêt à allonger à 6 mois, mais pas à abandonner. Pour Philippe Brun (Socialistes), ce texte était "une réponse imparfaite, insuffisante et peut-être dangereuse à un vrai problème, celui du défaut de production du logement dans notre pays". "Nous ne réglerons pas la crise du logement en poussant les ménages à s'endetter toujours plus", a aussi critiqué Nicolas Sansu (Gauche démocrate et républicaine).

"Aujourd’hui, notre pays accepte qu’un foyer puisse mettre 50 % de ses revenus dans un loyer, mais on va lui refuser un taux d’endettement à hauteur de 40 % pour acquérir un bien. Voici des absurdités d’un système très rigide. Le surendettement, il est chez les locataires, pas ailleurs", avait argumenté Lionel Causse dans une interview publiée par Challenges

De son côté, le Rassemblement national avait annoncé qu'il voterait pour le texte, en raison de son objectif affiché. "Mais pour des raisons de simplification et pour des raisons de principe, nous appelons à la suppression" du HCSF, avait indiqué Jocelyn Dessigny (RN)

Le gouverneur de la Banque de France François Villeroy de Galhau avait, quant à lui, fait part mi-mars de son opposition à la réforme initiale, soulignant que les banques n'utilisaient pas à plein la flexibilité déjà permise. 

(Avec AFP)